Session 2 : Gestion des connaissances - Modélisation
Nonaka et Takeuchi [The knowledge-Creating Company, Oxford University Press, Oxford, 1995] distinguent deux types connaissances : les connaissances explicites et tacites. Les connaissances explicites font l'objet d'inscriptions dans l'environnement (informatique ou non), et sont donc directement accessibles et compréhensibles par tous pour peu que l'on ait le niveau d'interprétation suffisant pour leur donner du sens (connaissances orales, écrites, codées d'une manière ou d'une autre). Les connaissances tacites sont celles qui n'ont pas d'inscription dans l'environnement, c'est-à-dire qu'elles restent propres à chaque individu. Ses connaissances sont révélées par le fait qu'il est capable d'actions nécessitant ces connaissances. Les connaissances tacites sont donc constituées de savoir-faire personnel, de croyance et de buts personnels.
Il existe quatre modes de conversion entre connaissances tacites et explicites :
[Jean-Louis Ermine, Le systèmes de connaissances, Hermés, Paris, 2ème édition, 2000]
Deux hypothèses importantes sont faites :
Une analyse de la connaissance nécessite d'utiliser toutes ces facettes pour les distinguer et construire un discours très structuré sur les connaissances de l'entreprise. L'analyse fine proposée par JL Ermine est reprise dans les sections suivantes et reprend par parties les grandes lignes des méthodes existantes pour les systèmes d'information (MERISE par exemple) et issues de l'intelligence artificielle (KADS par exemple, qui est étudiée dans ce cours).
Jean-Louis Ermine propose la synthèse suivante (inspirée librement des différents "triangles sémiotiques" que l'on peut trouver dans la littérature). Le triangle principal possède trois sommets (contexte, sens, information) qui sont chacun déclinés en un triangle présentant trois facettes (description dynamique, description statique, description temporelle) :
L'approche systémique permet de s'intéresser à des degrés de détail très différents d'un système étudié.
Ce modèle ajoute un niveau de pilotage au processus de transformation de flux. Il correspond à la vision taylorienne de l'organisation de la production.
Un système opérant "O" est contrôlé (via des flux d'information) par un système de décision "D".Il s'agit du modèle qui a donné lieu à la notion de "système d'information". Le système d'information est constitutué de tout ce qui stocke, mémorise et met à disposition l'information.
Le système d'information informe les décisionnaires de l'organisation qui agissent sur le système de production via le système opérant.
4 - Le modèle AIK (Acteurs- Informations - Connaissances) : Introduction
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Modèle "patrimoine des connaissances" (OID + K)Il s'agit de l'extension simple du modèle de système d'information. Jean-Louis Ermine estime que le patrimoine des connaissances existe bien en tant que sous-système à part entière. Deux activités lui sont rattachées :
Ce sont les acteurs de chacun de ces sous-systèmes qui enrichissent le patrimoine, mais c'est le patrimoine qui permet à ces acteurs de s'approprier les connaissances de l'entreprise pour mener à bien leur activité. |
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Les
connaissances n'ont, in
fine, d'existence que pour les acteurs qui peuvent agir
efficacement et rationnellement grâce à elles.
Elles sont donc intimement liées aux individus en tant que
tels (connaissances individuelles) ou en collectif (connaissances
collectives). Dans le modèle O.I.D., on peut donc
considérer que , du point de vue des connaissances, les
acteurs constituent un réseau unique A exploitant le
système d'information I pour leurs activités
spécifiques et échangeant avec le patrimoine des
flux de compétence et de cognition. les connaissances sont
valorisées comme capital de l'entrepise avec une
évaluation explicite R (prenant sa valeur dans les
réels R). Le modèle A.I.K ci-contre est complètement orienté "gestion des connaissances", assumant la valorisation R du capital, ce qui nécessitera des efforts d'évaluation (de mise en rapport des connaissances inscrites avec des résultats réels). |
Jean-Louis Ermine propose alors la définition suivante pour un système de gestion de connaissances : un système où des réseaux d'acteurs interagissent avec un système d'information (par des fonctions d'appropriation et d'expression). Ce système produit et consomme des connaissances (par des fonctions de compétence et de cognition). Ces connaissances s'accumulent dans le patrimoine de connaissance de l'organisation. Les connaissances sont évaluées par une fonction valeur. Un tel système apporte de la valeur ajoutée pour les connaissances, c'est-à-dire que les connaissances produites ont une valeur plus grande que les connaissances "utilisées". [j'ai préféré le terme "utilisées" au terme "consommées" employé par J.L. Ermine dans sa définition]
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Le modèle ci-contre représente le
modèle systèmique d'un système
gérant
des connaissances (SGC) tel qu'il a été
défini plus haut. Les théories de Nonaka
s'intègrent facilement dans ce modèle :
Les connaissances tacites sont des connaissances produites par les réseaux d'acteurs sans faire l'objet d'inscriptions explicites car elle ne sont pas explicitables (pour des raisons pratiques ou des raisons plus conceptuelles lorsqu'il s'agit de connaissances "incorporées", très difficiles, voire impossible à symboliser, ce qui est la condition sine qua non de l'explicitation. On comprend de ce schéma que K n'a pas de réalité physique particulière, ce système "apparaissant" à l'observateur quand il analyse le Système de Gestion des Connaissances de l'entreprise. |
Les
opérateurs sont notés ◊x pour indiquer
qu'il s'agit d'un opérateur de type "x". Opérateur de Wenger noté ◊w est issu des travaux de Wenger sur les communautés de pratique. Il exprime le fait que les acteurs s'agrégent entre acteurs pour former une communauté qui produit des connaissances à valeur ajoutée. Une communauté de pratique est caractérisée (d'après Wenger) par un référentiel commun, une entreprise commune, un objectif commun. Opérateurs de Nonaka :
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© Alain Mille Décembre 2008